Un lieu restauré par des bénévoles

Publié le par Maison du fontainier

Le premier chantier d’août 1994

 

En même temps que les travaux de rénovation qui ont porté sur l’extérieur et les étages de la maison du Fontainier, notre association pour la Sauvegarde et la Mise en valeur du Paris historique a entamé une campagne de déblaiement et de fouilles du sous-sol en mettant en place un chantier de jeunes bénévoles au cours de l’été 1994.

La campagne consistait en la mise au jour des structures du XVIIe siècle, leur étude pouvant apporter des renseignements complémentaires sur l’histoire de l’alimentation en eau de Paris. En outre, l’analyse des remblais pouvait, quant à elle, donner des informations intéressantes sur ce bâtiment, le plus ancien du 14e arrondissement de Paris.

Ainsi, dès le départ, ces fouilles ont permis de faire apparaître, le long des murs est, nord et ouest, un niveau maçonné faisant « banquette ». Au sud, cette banquette est séparée du mur par une rigole joignant les trois salles à travers les deux murs de refend. Faisant un coude à l’angle sud-ouest, elle longe le mur ouest et communique, au travers des fondations, avec le réservoir du XIXe siècle.

Un bassin cimenté a été, par ailleurs, mis au jour au centre de chaque salle. Dans le fond de ces bassins apparaissent deux orifices ; l’un, très abîmé, laisse voir le départ d’une canalisation en plomb, le second, plus large, se trouve dans une petite niche en cul de four, avec des restes de mécanismes en fonte. Au sud, entre chaque bassin, il y a une communication par la rigole.

Les banquettes sont très abîmées et laissent apparaître des reliefs dans le mortier, ainsi que des carrelages inclus dans la maçonnerie.

Un sondage de l’escalier du couloir a permis de déterminer que le niveau d’origine était plus bas. Deux marches en place ont été dégagées. Un regard, au centre de ce couloir, communique avec la canalisation de la salle des Carmélites et avec la galerie nord, dans une contremarche de l’escalier.

 

Le plan des structures mises au jour ne correspond pas aux plans du XVIIe siècle. Les différences portent en particulier sur la taille des bassins (ceux mis au jour sont plus grands et datent du XIXe siècle) et sur l’alimentation en eau des salles latérales (au milieu des murs de refend d’après les plans du XVIIe siècle, le long du mur sud actuellement). La rigole semble avoir été creusée lors de la construction du grand réservoir, simultanément à des modifications de la taille des bassins et de la hauteur des banquettes. La présence de fonte dans les mécanismes corrobore l'hypothèse que l’ensemble de ce qui est visible aujourd'hui date de 1845 (construction du grand réservoir).

Les remblais n’ont pas amené la mise au jour de pièces caractéristiques. La céramique usuelle est pratiquement absente, il s’agit en majeure partie de résidus de plâtre.

On a par ailleurs sondé sur quelques centimètres carrés l’emplacement vraisemblable d’une plaque commémo­rative dans le mur de refend au-dessus du bassin de la ville. Cette tentative n’a malheureusement pas permis de la faire apparaître. Toutefois, le texte en était prévu ainsi que celui de deux autres inscriptions préparées pour le grand regard de Rungis et pour le pont-aqueduc d’Arcueil. C’est pourquoi une nouvelle plaque en pierre, où a été gravée l’inscription latine initialement prévue, a été posée en 1995 à l’emplacement d’origine.

Depuis 1994...

Les trois galeries de répartition, dans lesquelles couraient les canalisations vers Paris ont été aussi déblayées.

Une galerie vers l'ouest, desservant le grand réservoir de 1845 a été dégagée. Ont été mises en évidence quatre sorties de canalisation de diamètres différents, une au niveau du sol, trois à différentes hauteurs. On trouve dans les murs latéraux des traces de crochets en fer qui soutenaient et guidaient ces canalisations en hauteur.

 

Au centre du couloir distribuant les trois bassins, nous avons accédé, par une trappe, à une fosse qui semble dépendre du bassin central. Les quelques seaux de terre enlevés ne permettent pas encore actuellement d'en comprendre la fonction.

 

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De même, l’aqueduc, sous l’Observatoire de Paris, a été débarrassé de toutes les pierres provenant de la démolition partielle de deux murs parasites, certaine­ment construits pendant la Seconde Guerre mondiale. Le regard n° 26, dans les jardins de l’Observatoire de Paris, a été nettoyé à l’extérieur et à l’intérieur pour en faciliter l'accès.

En 1998, nous avons procédé à l'installation d’une grille en fer forgée, entièrement scellée, entre les deux propriétés (Observatoire et Fontainier), remplaçant ainsi le mur mitoyen détruit, pour dégager et rendre la perspective de l'aqueduc.

Lors du déblaiement de la partie de l’aqueduc située sous la maison du Fontainier, nous avions constaté qu'une partie de la paroi de cette galerie, côté ouest, avait été détruite au-dessus de la banquette et nous avions prévu de la réparer. Très vite, il est apparu évident que cette partie détruite était en fait, à l’origine, une petite galerie menant à un puits (adduction ?) maçonné, en pierres de taille de un mètre sur un mètre, qui fut ensuite condamnée. Ce puits que nous avons mis au jour est profond d’environ six mètres.

Enfin nous avons aussi mis au jour, au droit de l’escalier est et à l’extérieur de la maison, une citerne recueillant les eaux de pluie et entièrement comblée de gravats.

Le déblaiement de la galerie se dirigeant à l’est vers l’hôpital Cochin, quant à lui, est toujours en cours. Lors des chantiers, nous avions découvert, crevant la voûte, quatre puits remblayés par des pierres depuis la surface. Ceux-ci ont été consolidés au plâtre gros, lorsque cela s’avérait nécessaire.

Cette galerie, déblayée en gros dans un premier temps, afin d’en enlever la terre et les gravats qui y avaient été entassés, a été fouillée plus précisément sur une cinquantaine de mètres. Cette opération a permis de mettre au jour son niveau d’origine, ainsi qu’une série de huit « reposoirs » en pierre sur seize, originellement construits. Ils sont régulièrement disposés au niveau des chaînages de pierre (distants les uns des autres d’environ 3,80 mètres) et perpendiculaires au mur de la galerie. La canalisation qui alimentait l’ancien hôpital des Capucins (aujourd’hui hôpital Cochin) pouvait être posée sur ces constructions. Ces dernières avaient aussi pour rôle de stabiliser les chaînages en neutralisant les poussées vers l’intérieur. Au début de la galerie, les huit premiers reposoirs manquants ont dû être détruits ; nous ne les avons pas retrouvés au moment du déblaiement.

Les objectifs de ces chantiers ont été atteints malgré la « pénibilité » du travail : plus de trois cents tonnes de remblais ont été évacués du sous-sol, uniquement à la pelle et au seau…

L’aménagement du sous-sol, pour permettre une circulation plus aisée, nécessite encore de poursuivre les travaux de déblaiement. Les remblais ne justifient pas d’étude particulière car ils sont plus récents que ceux des bassins.

 

Ainsi, en 1994, alors qu’une campagne de travaux avait été prévue et que les substructions de ce grand regard devaient être détruites puis aménagées, sans tenir compte de leur valeur architecturale et historique, pour les besoins d’une installation nouvelle, un petit groupe de bénévoles et/ou de passionnés ont su encourager un projet puis une véritable entreprise de mise en valeur d’un patrimoine unique à Paris : une maison entièrement dédiée à l’eau, à son histoire, à son architecture…

Cet extraordinaire réseau enfoui sous des tonnes de terre et de gravats a pu enfin revoir le jour et être ouvert à un large public, dans son intégralité. Ce pari, difficile à prendre, fut gagné grâce à la ténacité, à l’enthousiasme et au dévouement de dizaines de bénévoles français et étrangers, ne comptant jamais leur temps passé à manier pelles et seaux, et soutenus financièrement par des organisations publiques et privées.

A l’heure actuelle, la maison du Fontainier sert notamment de support à des activités para- et périscolaires et permet de sensibiliser les élèves à l’histoire et à l’architecture de l’eau. Elle est aussi ouverte une ou deux fois par mois, à tous les publics, pour des visites-conférences d'une durée d'environ deux heures (cliquez ici).

 

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Sauvegarder, restaurer, réhabiliter, faire connaître le patrimoine, telle est notre mission. Une mission qui ne s’arrête pas là. Ces projets de sauvegarde et de mise en valeur, qui associent des bénévoles, doivent être utiles à la collectivité, former des volontaires de tous âges aux techniques de la restauration, à la pratique de la vie associative et contribuer ainsi au développement social, culturel et économique local.

 

 

Ces chantiers ont été plusieurs fois récompensés. En 1998, l’association pour la Sauvegarde et la Mise en valeur du Paris historique a obtenu de la région Ile-de-France le prix de la mise en valeur du patrimoine francilien, et en 2000 le Trophée régional du meilleur chantier de jeunes bénévoles.

Publié dans Histoire et chantiers

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